vendredi, 20 août 2010
Contrat d'amodiation et clause abusive
Un arrêt de la Cour de Cassation sur ce sujet :
Vu l'article L. 132-1, alinéa 1er, du code de la consommation ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;
Attendu qu'en vertu d'un contrat d'amodiation conclu le 18 mai 2000 avec la société Port Deauville (la société), concessionnaire de l'exploitation du port de plaisance de Deauville pour une durée de cinquante ans à compter du 1er janvier 1972, M. X... est devenu amodiataire d'un poste d'amarrage et de mouillage pour une durée fixée par l'article 1er du contrat à celle de la concession ; qu'ayant vendu son bateau, il a, par lettre du 13 juin 2006, notifié la résiliation du contrat avec effet au 20 juin 2006, précisant être à jour des charges afférentes à l'emplacement en cause ; qu'assigné en paiement d'un complément de charges portuaires au titre de l'année 2006 et des charges de l'année 2007, il a opposé le caractère abusif de la clause fixant la durée de l'amodiation à celle de la concession ;
Attendu que, pour écarter le caractère abusif de la clause litigieuse et condamner M. X... à payer à la société les sommes par elle réclamées, le jugement attaqué énonce, d'abord, que la durée du contrat, qui est longue, s'explique par la nature du contrat portant occupation du domaine maritime de l'Etat, qu'elle a été contradictoirement acceptée par l'amodiataire lors de la signature du contrat, qu'elle s'impose donc aux deux parties et qu'il n'existe pas de déséquilibre entre les droits et obligations des deux parties, tenues l'une comme l'autre par cette durée, ensuite, que, si l'article 5 du contrat interdit à l'amodiataire de céder ou de sous-louer l'emplacement, cette règle est toutefois limitée par le règlement de police applicable au port de plaisance qui prévoit, en son article 27, alinéa 2, qu'en cas de vente d'un navire, le poste d'accostage concerné ne peut faire l'objet d'un transfert de jouissance, de la part du titulaire, au profit du nouveau propriétaire sans un accord formel du concessionnaire, de sorte qu'il appartient à M. X... de faire le nécessaire et qu'il ne peut se voir déchargé de ses obligations contractuelles concernant la durée de la convention, enfin, que, s'il est établi et non contesté que la société a mis l'emplacement à la disposition de tiers, ce fait constitue l'application de l'article 26 du règlement précité qui l'autorise à disposer de l'emplacement toutes les fois que l'amodiataire le libère pendant plus de sept jours sans effectuer une déclaration d'absence ;
Qu'en se déterminant ainsi, quand l'article 1er du contrat d'amodiation a pour objet et pour effet de maintenir l'amodiataire dans les liens contractuels pendant la durée de la concession en lui imposant de payer les charges portuaires afférentes à l'emplacement amodié, sans lui réserver la faculté de résilier la convention pour un motif légitime, et alors que, d'une part, l'article 5 lui interdit de céder ou sous-louer l'emplacement, tandis que le règlement de police du port ne prévoit la possibilité d'un transfert de jouissance du poste d'accostage qu'en cas de vente d'un navire et assujettit ce transfert à un accord formel du concessionnaire, et que, d'autre part, la société est autorisée à disposer de l'emplacement au profit de tiers passé un délai d'inoccupation de sept jours, de sorte que la société ne justifie pas d'un préjudice en cas de résiliation moyennant un préavis de sept jours ; qu'il en résulte un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; que la clause contenue à l'article 1er du contrat d'amodiation est donc abusive et, partant, réputée non écrite ; que, dès lors, la juridiction de proximité a violé, par refus d'application, les dispositions du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 5 juin 2008, entre les parties, par la juridiction de proximité de Pont-L'Evêque ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Lisieux ;
Condamne la société Port Deauville aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Port Deauville à verser à M. X... la somme de 2.000 € ; rejette la demande de la société.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir condamné Monsieur X... au paiement de la somme de 1.773,26 € avec intérêts au taux de 1 % à compter du 5 juillet 2007 et ce, jusqu'à complet paiement au profit de la société Port Deauville ;
AUX MOTIFS QUE l'article 1er du contrat d'amodiation fixe la durée du contrat à celle de la concession du Port de Plaisance de Deauville ; qu'il est indiqué, page 1, que « l'amodiataire déclare avoir pris parfaite connaissance de la dite concession et du cahier des charges sus énoncés et être en possession d'une copie de ces documents » ; que l'article 7 du contrat d'amodiation précise qu'une copie de la concession lui est remise et dans ce contrat l'article 42 fixe la durée de la concession à 50 ans à partir du 1er janvier suivant la date de l'acte de concession soit le 1er janvier 1972 ; que certes la durée du contrat est longue mais elle s'explique par la nature du contrat portant occupation du domaine maritime de l'Etat et elle a été contractuellement acceptée par Monsieur Pierre X... lors de la signature du contrat ; qu'elle s'impose donc aux deux parties et il n'existe pas de déséquilibre entre les droits et obligations des deux parties qui sont tenues l'une comme l'autre par cette durée ; que certes l'article 5 du contrat d'amodiation interdit à l'amodiataire de céder ou de sous-louer l'emplacement ; que cette règle est toutefois limitée par le règlement de police applicable au Port de Plaisance qui prévoit dans son article 27 alinéa 2 « En cas de vente d'un navire, le poste d'accostage concerné ne peut, en aucun cas, faire l'objet d'un transfert de droit de jouissance, de la part du titulaire, au profit du nouveau propriétaire sans un accord formel du concessionnaire » ; qu'il appartient donc à Monsieur Pierre X... de faire le nécessaire en ce sens mais il ne peut se voir déchargé de ses obligations contractuelles concernant la durée de la convention ; qu'il est établi et non contesté par la société Port Deauville que celle-ci a mis l'emplacement litigieux à la disposition de tiers ;
ALORS QUE l'article 1 du contrat d'amodiation a pour objet et pour effet de maintenir l'amodiataire dans les liens contractuels pendant cinquante ans en lui imposant de payer les charges afférentes à l'emplacement réservé, quand bien même il serait placé pour un motif légitime dans l'impossibilité d'utiliser cet emplacement et que la résiliation du contrat ne causerait aucun préjudice au concessionnaire ; que le caractère abusif de cette clause est encore aggravé par l'article 5 du contrat qui interdit à l'amodiataire de sous-louer ou de céder son emplacement ; qu'en raison de ses conditions extrêmement restrictives d'application, dont le Juge du fond ne constate pas qu'elles se trouvent réunies en l'espèce, l'article 27 alinéa 2 du règlement de police du port n'a pas pour effet de faire disparaître le déséquilibre significatif ainsi créé par la clause de durée litigieuse au détriment du consommateur ; qu'en refusant de constater le caractère abusif de la clause, et d'en constater la nullité, la juridiction de proximité a violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir condamné Monsieur X... au paiement de la somme de 1.773,26 € avec intérêts au taux de 1 % à compter du 5 juillet 2007 et ce, jusqu'à complet paiement ;
AUX MOTIFS QUE si la faculté de résiliation est effectivement prévue, cette faculté est soumise à l'acceptation de la société Port Deauville SA ; que s'il est établi et non contesté par la société Port Deauville SA que celle-ci a mis l'emplacement litigieux à disposition de tiers, ce fait constitue l'application du règlement de police du port de plaisance et de son article 26 qui précise que tout amodiataire doit effectuer une déclaration d'absence toutes les fois qu'il libère pendant plus de 7 jours le poste amodié et que faute d'avoir été saisie d'une telle déclaration, la société Port Deauville en disposera ; que cette mise à disposition ne peut s'analyser comme une acceptation de la résiliation par Port Deauville, puisque le transfert du droit de jouissance à un nouveau propriétaire nécessite un acte écrit d'amodiation informant le nouveau propriétaire de ces droits et obligations et constatant le transfert de jouissance, ces contrats devant faire l'objet d'enregistrement et d'accord formel de la société Port Deauville SA ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'article 27 du règlement de police du port de Deauville, qui n'est applicable qu'en « cas de vente d'un navire », stipule clairement que l'accord formel du concessionnaire concernant le transfert de jouissance du poste d'accostage n'est exigé que dans l'hypothèse où ce transfert a lieu, d'une part, à l'initiative du titulaire de l'emplacement et, d'autre part, au profit du nouveau propriétaire du bateau ; qu'il résulte des énonciations du jugement attaqué que cette disposition était inapplicable en l'espèce, le transfert de jouissance ayant eu lieu au profit de tiers sans vente de navire et à la seule initiative du concessionnaire ; qu'en conséquence l'attitude du Port emportait acceptation de la résiliation du contrat que lui avait notifiée Monsieur X... ; que c'est dès lors en dénaturant les termes clairs et précis de l'article 27 du règlement de police du port que le Juge de proximité a considéré qu'à défaut de l'accord formel prévu à cette disposition, le concessionnaire ne saurait avoir accepté la résiliation du contrat notifiée par Monsieur X... au 20 juin 2006 ; qu'en statuant ainsi, le Juge de proximité a violé ledit règlement et l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en s'abstenant de rechercher si cette réutilisation de l'emplacement remis à sa disposition, de son plein gré et en-dehors de tout code légal ou réglementaire, n'impliquait pas, de la part de la société Port Deauville l'acceptation de la résiliation du contrat qui lui avait été notifiée, le juge du fond a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
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La recommandation de la Commission des Clauses abusives sur les contrats de prévoyance obséques
Voici le texte de cette recommandation du 25 juin 2010 :
La Commission des clauses abusives,
Vu l’article 3 de la loi du 15 novembre 1887 ;
Vu les dispositions de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 ;
Vu les dispositions du code de la consommation et notamment les articles L. 132-1 à L. 132-5 et R. 132-1 à R. 132-2-1 ;
Vu les dispositions du code des assurances et notamment les articles L. 132-8 et L. 132-23-1 ;
Vu les dispositions du code général des collectivités territoriales et notamment les articles L. 2223-19, L. 2223-20, L. 2223-23, L. 2223-34-1 et L. 2223-35-1 ;
Vu l’article 42 du code de procédure civile ;
Vu la circulaire de normalisation n° NOR/INT/B/06/00119/C du 20 décembre 2006 ;
Entendu les représentants des professionnels concernés ;
Considérant qu’à la fin de l’année 2009, deux millions et demi de contrats de prévoyance obsèques avaient été souscrits et que ce nombre est appelé à se développer fortement compte tenu de l’évolution démographique ;
Considérant que l’appellation « contrats de prévoyance obsèques » recouvre deux types de contrats d’assurance vie-décès : des contrats en prestations et des contrats en capital ; que, dans la mesure où ces derniers ne garantissent pas que le capital sera versé à un opérateur funéraire et n’ont donc pas de lien nécessaire avec le financement des obsèques, le champ de la présente recommandation porte uniquement sur les contrats en prestations associant un intermédiaire d’assurance à un opérateur funéraire ; que la finalité de ces contrats est de garantir le versement d’un capital à l’opérateur funéraire pour qu’il réalise les obsèques selon les volontés du consommateur ;
Considérant que la Commission regrette que la présentation commerciale de certains contrats laisse penser au consommateur que ses volontés seront respectées dans l’organisation de ses obsèques, alors même que le contrat, étant de capitalisation, n’a pas cet objet, ou bien, lorsqu’il s’agit d’un contrat de prévoyance obsèques à proprement parler, que ce respect n’est pas contractuellement garanti ;
Considérant que certains montages contractuels sont d’une grande complexité juridique faisant intervenir une association, un groupement d’intérêt économique funéraire, un opérateur funéraire, un mandataire, un assureur, un assisteur, etc. ; que leur présentation matérielle ne permet pas toujours au consommateur d’identifier les multiples intervenants et leurs rôles respectifs ;
Considérant que l’examen de ces contrats révèle des clauses abusives relatives au contenu du contrat, à sa modification, à l’exécution et à l’inexécution des prestations ;
I - Les clauses relatives au contenu du contrat
1° - Considérant que les contrats de certains opérateurs funéraires proposent au consommateur un ensemble de prestations sans faire apparaître clairement la distinction entre celles qui, en application de l’article L. 2223-20 du code général des collectivités territoriales, présentent un caractère obligatoire pour l’exécution de leur mission de service public, et celles qui sont seulement facultatives ; que ces clauses ne permettent pas au consommateur de se faire une idée précise des prestations obligatoires ; qu’en contrevenant ainsi aux dispositions légales précitées, elles sont illicites et que, maintenues dans les contrats, elles présentent un caractère abusif ;
2° - Considérant que plusieurs contrats présentent certaines prestations funéraires comme obligatoires, alors qu’elles ne revêtent pas ce caractère en vertu de l’article L. 2223-20 du code général des collectivités territoriales ; que, dans la mesure où ces clauses laissent croire au consommateur qu’il est tenu de souscrire de telles prestations, elles sont de nature à créer un déséquilibre significatif à son détriment ;
II - Les clauses relatives à la modification du contrat
3°- Considérant que certains contrats contiennent une clause en vertu de laquelle le devis des prestations, qui sert de base au montant du capital que va choisir le consommateur, a une durée de validité de 4 mois après sa signature ; cette clause est de nature à laisser croire au consommateur que, 4 mois après son acceptation du devis, le professionnel sera libre de modifier les termes de son engagement ; que cette clause relève donc de l’interdiction du 3°) de l'article R. 132-1 du code de la consommation ;
4° - Considérant que certaines clauses permettent, à l’occasion de la modification de l’opérateur funéraire par le consommateur conformément aux dispositions de l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales, au mandataire désigné par ce dernier de limiter son obligation contractuelle de garantir la bonne exécution des obsèques ; que ces clauses, qui sont de nature à permettre au professionnel d’alléger unilatéralement son obligation contractuelle à l’occasion de l’exercice d’une prérogative légale par le consommateur, créent un déséquilibre contractuel significatif au détriment de ce dernier ;
5° - Considérant que plusieurs contrats permettent expressément au consommateur, conformément aux dispositions de l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales, de modifier certains éléments de son contrat, notamment le montant du capital initialement choisi ; que toutefois, certaines clauses prévoient, en cas d’augmentation de ce capital, un paiement immédiat par le consommateur tandis que, en cas de diminution, le remboursement dû aux héritiers n’est prévu qu’après son décès ; que de telles stipulations, qui permettent au professionnel de conserver ces sommes sans aucune justification pendant une durée indéterminée, sont de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; qu’elles sont donc abusives ;
6° - Considérant que diverses clauses permettent à l’opérateur funéraire, dans l’hypothèse « où certaines prestations ou fournitures seraient modifiées ou supprimées », de leur conserver « une qualité et/ou un caractère équivalent » ; que de telles clauses, par leur généralité, autorisent le professionnel à substituer, à sa discrétion, des prestations à celles initialement prévues ; qu’elles sont abusives au sens du 3°) de l’article R. 132-1 du code de la consommation ;
7° - Considérant que les contrats de plusieurs opérateurs funéraires prévoient que certaines prestations ou fournitures, non stipulées mais nécessaires à la « bonne exécution » des obsèques, feront l’objet d’une facturation supplémentaire et d’un prélèvement automatique ; que de telles clauses, en ce qu’elles permettent au professionnel d’imposer unilatéralement des prestations supplémentaires au consommateur, en fonction d’éléments insuffisamment précis et explicites, sont abusives au sens du 3°) de l’article R.132-1 du code de la consommation ;
8° - Considérant que le contrat d’un opérateur funéraire, prévoit, sans autre précision, que le changement de domicile du consommateur peut entraîner une modification de son contrat ; qu’aucun détail n’est donné sur cette modification éventuelle ni sur les conséquences qui pourraient résulter d’un changement de domicile quelle que soit la distance séparant le nouveau domicile de l’ancien ; que, par sa généralité, cette stipulation est de nature à réserver au professionnel la possibilité de modifier unilatéralement et discrétionnairement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre, en méconnaissance des dispositions du 3°) de l’article R.132-1 du code de la consommation ;
9° - Considérant que certaines clauses prévoient que le consommateur ne peut changer l’opérateur funéraire, bénéficiaire du contrat, qu’avec l’accord préalable de celui initialement choisi ; que ces stipulations ne permettent pas au consommateur de modifier l’opérateur funéraire à tout moment contrairement à ce que prévoit l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales ; qu’elles sont illicites et que, maintenues dans les contrats, elles présentent un caractère abusif ;
10° - Considérant que certaines clauses prévoient un délai minimum pour modifier l’opérateur funéraire ; que ces dispositions ne permettent donc pas au consommateur de changer d’opérateur funéraire à tout moment contrairement à ce qu’édicte l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales ; qu’elles sont illicites et que, maintenues dans les contrats, elles présentent un caractère abusif ;
III - Les clauses relatives à l’exécution et l’inexécution des prestations
11° - Considérant que les contrats qui prévoient le paiement par primes périodiques imposent le prélèvement automatique comme mode unique de paiement ; que de telles stipulations sont abusives en ce qu’elles ne laissent aucun choix du mode de paiement au consommateur ;
12° - Considérant que certaines clauses subordonnent la mise en œuvre des prestations d’assistance, en particulier celle relative au rapatriement du corps, à l’obligation, pour « tout membre de la famille », après le décès du souscripteur, de téléphoner au gestionnaire du contrat et de lui déclarer des « éléments », sans autre précision ; que, faute pour le consommateur de connaître à l’avance les renseignements susceptibles de lui être demandés et, surtout, de savoir sur quelles bases le gestionnaire serait amené à refuser la prise en charge du rapatriement, les clauses litigieuses sont de nature à autoriser le professionnel à faire dépendre l’exécution de son obligation de sa seule discrétion ; qu’elles rompent ainsi l’équilibre contractuel au détriment du consommateur, en contravention aux dispositions du 1°) de l’article R.132-2 du code de la consommation ;
13° - Considérant que les contrats organisent la procédure à suivre pour que l’assisteur exécute son obligation contractuelle de rapatriement du corps ; qu’une clause subordonne cette prestation à la réalisation par ce dernier de « vérifications utiles » ; que la nature des « vérifications » à effectuer n’étant nullement précisée, l’intervention du professionnel ne dépend que de sa seule appréciation de la situation et qu’ainsi, postérieurement à la conclusion du contrat, il sera en mesure de se libérer discrétionnairement de son obligation contractuelle ; qu’une telle stipulation contractuelle crée un déséquilibre significatif au détriment du consommateur et qu’elle est présumée abusive au sens du 1°) de l’article R.132-2 de la consommation ;
14° - Considérant que certaines clauses prévoient que l’assureur, après le décès du consommateur et le versement du capital convenu, se réserve le droit de demander « tout justificatif complémentaire qu’il juge utile » ; que ces stipulations sont de nature à laisser croire au consommateur que, faute pour lui d’être en mesure de répondre à ces exigences indéterminées, laissées à la discrétion du professionnel, le versement du capital souscrit pourrait être remis en cause ; qu’une telle clause est de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; qu’elle est donc abusive ;
15° - Considérant que certains contrats relatifs à la garantie d’assistance rapatriement du corps prévoient une liste de cas dans lesquels la société d’assistance entend se libérer de son obligation contractuelle ; que l’usage de l’adverbe « notamment » placé au début de cette liste ainsi que l’énumération de diverses hypothèses insuffisamment précises ou limitées permettent au professionnel de se libérer de son obligation contractuelle même dans des situations ne relevant pas de la force majeure ; qu’une telle clause crée un déséquilibre significatif au détriment du premier ; qu’elle est donc abusive ;
16°- Considérant que certains contrats prévoient que le tribunal compétent en cas de litige est celui du siège social du professionnel ; que l’article 48 du code de procédure civile prohibe la clause attributive de compétence entre professionnels et consommateurs ; que de telles clauses, qui ont pour objet de déroger aux règles impératives de compétence territoriale, sont illicites et que, maintenues dans les contrats, elles sont abusives.
Recommande que soient éliminées des contrats de prévoyance obsèques les clauses ayant pour objet ou pour effet :
1° - de ne pas mettre le consommateur en mesure d’identifier les prestations funéraires obligatoires, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 2223-20 du code général des collectivités territoriales ;
2° - de laisser croire au consommateur qu’il est tenu de souscrire certaines prestations funéraires qui, pourtant, ne revêtent aucun caractère obligatoire ;
3° - de laisser croire au consommateur que le professionnel, postérieurement à l’acceptation du devis, aura la faculté de modifier les termes de son engagement ;
4° - de permettre au mandataire, en méconnaissance des dispositions du 4°) de l’article R. 132-1 du code de la consommation, de modifier unilatéralement son obligation contractuelle de garantir la bonne exécution des obsèques à l’occasion de l’exercice par le consommateur d’une prérogative légale ;
5° - de prévoir un paiement immédiat du consommateur lorsqu’il décide d’augmenter le capital et un remboursement, seulement après son décès, lorsqu’il choisit d’en diminuer le montant ;
6° - d’autoriser le professionnel à modifier ou supprimer de manière discrétionnaire certaines prestations ou fournitures ;
7° - d’autoriser le professionnel à facturer de manière unilatérale au consommateur des prestations non initialement stipulées, en méconnaissance des dispositions du 3°) de l’article R. 132-1 du code de la consommation ;
8°- de réserver au professionnel le droit de modifier discrétionnairement les clauses du contrat en cas de changement de domicile du consommateur ;
9°- de soumettre le changement d’opérateur funéraire initialement choisi à l’accord de ce dernier, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales ;
10° - d’imposer au consommateur un délai pour changer d’opérateur funéraire, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 2223-35-1 du code général des collectivités territoriales ;
11° - d’imposer au consommateur le prélèvement automatique comme mode unique de paiement ;
12°- de permettre au professionnel de faire dépendre l’exécution de sa prestation à la fourniture, par le consommateur, d’ « éléments » indéterminés ;
13° - de permettre à l’assisteur de faire dépendre l’exécution de son obligation de rapatriement du corps de vérifications non définies et laissées à son appréciation discrétionnaire ;
14° - de laisser croire au consommateur que, postérieurement au décès du souscripteur, le versement du capital pourrait être remis en cause à défaut de la fourniture par ce premier de justificatifs relevant de la seule discrétion du professionnel ;
15° - de permettre au professionnel de se libérer de son obligation contractuelle même dans des situations non constitutives de la force majeure ;
16°- de déroger aux règles légales de compétence territoriale des juridictions.
Recommandation adoptée le 15 avril 2010 sur le rapport de Mme Ariane Pommery
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L'arrêt Benefic
Rendu par la Cour de Cassation en juin 2010 :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la Banque postale et La Poste que sur le pourvoi incident relevé par l'association Consommation, logement et cadre de vie, M. et Mme X..., M. Y..., M. et Mme Z..., Mme B..., M. C..., Mme D..., M. E..., M. et Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., M. J..., Mme K... et Mme L... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Consommation, logement et cadre de vie (l'association CLCV) et dix-sept personnes physiques qui avaient souscrit auprès de La Poste des parts d'un fonds commun de placement dénommé Bénéfic (les souscripteurs), soutenant que les pertes subies à la suite de ce placement résultaient de fautes commises par La Poste, ont demandé que celle-ci soit condamnée à leur payer des dommages-intérêts ; que La Poste et La Banque postale, venant aux droits de La Poste, ont fait appel du jugement ayant accueilli ces demandes ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que La Banque postale et La Poste font grief à l'arrêt de les avoir condamnées solidairement à payer des dommages-intérêts aux souscripteurs, alors, selon le moyen, que pour rejeter les pourvois formés respectivement contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 septembre 2006 et 15 janvier 2007, qui avaient débouté les demandeurs au pourvoi de leur demande après relaxe de Pierre M... et de La Poste du chef de publicité de nature à induire en erreur, la chambre criminelle avait énoncé dans ses arrêts du 16 octobre 2007 que "contrairement aux affirmations des plaignants, la publicité décrivait les caractéristiques du produit et faisait apparaître que le remboursement d'une somme égale au capital initial n'était garanti que jusqu'à 23 % de baisse de l'euro 50 ; que les juges ajoutent que le risque d'une baisse plus importante n'était pas exclu, même si l'attention n'était pas spécialement attirée sur un tel risque" ; que les arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 2007, par un motif qui était le soutien nécessaire du dispositif, avaient dit dépourvus de caractère mensonger ou trompeur de nature à induire en erreur, les documents publicitaires Bénéfic, ce dont il résultait que la cour d'appel ne pouvait se prononcer sur le caractère prétendument mensonger ou non des dépliants Bénéfic ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil et la règle de l'autorité absolue de la chose jugée au pénal ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé que l'absence de faute pénale non intentionnelle ne fait pas obstacle à l'exercice d'une action devant les juridictions civiles afin d'obtenir la réparation d'un dommage sur le fondement de la responsabilité civile, la cour d'appel a pu, sans encourir la critique du moyen, rechercher si La Poste avait engagé sa responsabilité civile en manquant aux obligations d'information spécialement imposées à la personne qui commercialise des parts de fonds commun de placement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 33 du règlement n° 89-02 de la Commission des opérations de bourse, modifié par le règlement n° 98-04, alors applicable ;
Attendu que pour condamner solidairement La Poste et la Banque postale à payer des dommages-intérêts à l'association CLCV et aux souscripteurs, l'arrêt retient que l'article 33 du règlement n° 89-02 de la Commission des opérations de bourse prescrit de mentionner les caractéristiques les moins favorables et donc les pertes et que La Poste a contrevenu à cette disposition puisque, si les documents publicitaires donnent des exemples chiffrés de gain, ils ne font aucune allusion à une baisse du CAC 40 de 23 % ou plus et ne donnent aucun exemple chiffré de perte de capital ;
Attendu qu'en retenant que l'article 33 du règlement n° 89-02 de la Commission des opérations de bourse imposait de faire figurer dans les documents publicitaires des exemples chiffrés de perte en capital, la cour d'appel a ajouté à ce texte une condition qu'il ne comporte pas, violant ainsi cette disposition ;
Et sur le même moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1147 du code civil, ensemble l'article 33 du règlement n° 89-02 de la Commission des opérations de bourse, modifié par le règlement n° 98-04, alors applicable ;
Attendu qu'en retenant que les documents publicitaires ne faisaient aucune allusion à une baisse du CAC 40 de 23 % ou plus, après avoir constaté, par motifs adoptés, que ces documents mentionnaient que le capital net investi était protégé jusqu'à 23 % de baisse du CAC 40, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ni sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne l'association Consommation, logement et cadre de vie, M. et Mme X..., M. Y..., M. et Mme Z..., Mme B..., M. C..., Mme D..., M. E..., M. et Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., M. J..., Mme K... et Mme L... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour la société La Banque postale et de La poste, demanderesses au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement La Poste et la Banque Postale à payer à titre de dommages et intérêts à M. X..., Mme X..., M. Y..., Mme L..., M. Z..., Mme Z..., M. E..., Mme D..., M. C..., M. F..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., Mme K..., M. J... les sommes visées au dispositif de l'arrêt attaqué ;
AUX MOTIFS QUE La Poste et la Banque Postale soulèvent l'autorité de la chose jugée attachée aux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 2007 qui ont dit que le délit de publicité fausse ou mensongère n'était pas caractérisé ; mais que l'absence de faute pénale non intentionnelle ne fait pas obstacle à l'exercice d'une action devant les juridictions civiles afin d'obtenir la réparation d'un dommage sur le fondement de la responsabilité civile ;
ALORS QUE pour rejeter les pourvois formés respectivement contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 septembre 2006 et 15 janvier 2007, qui avaient débouté les demandeurs au pourvoi de leur demande après relaxe de Pierre M... et de La Poste du chef de publicité de nature à induire en erreur, la chambre criminelle avait énoncé dans ses arrêts du 16 octobre 2007 que «contrairement aux affirmations des plaignants, la publicité décrivait les caractéristiques du produit et faisait apparaître que le remboursement d'une somme égale au capital initial n'était garanti que jusqu'à 23 % de baisse de l'euro 50 ; que les juges ajoutent que le risque d'une baisse plus importante n'était pas exclu, même si l'attention n'était pas spécialement attirée sur un tel risque» ; que les arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 16 octobre 2007, par un motif qui était le soutien nécessaire du dispositif, avaient dit dépourvus de caractère mensonger ou trompeur de nature à induire en erreur, les documents publicitaires Bénéfic, ce dont il résultait que la cour d'appel ne pouvait se prononcer sur le caractère prétendument mensonger ou non des dépliants Bénéfic ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1351 du code civil et la règle de l'autorité absolue de la chose jugée au pénal.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement La Poste et la Banque Postale à payer à titre de dommages et intérêts à M. X..., Mme X..., M. Y..., Mme L..., M. Z..., Mme Z..., M. E..., Mme D..., M. C..., M. F..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., Mme K..., M. J... et la CLCV les sommes visées au dispositif de l'arrêt attaqué ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE si les intimés ne visent pas expressément l'article 33 du règlement de la COB n° 89-2, ils font grief à La Poste de ne pas mentionner les cas de perte, alors que des exemples chiffrés précis sont donnés en cas de gains, contrairement à ce qu'impose le règlement précité qui prescrit de mentionner les caractéristiques les moins favorables et donc les pertes ; que La Poste a contrevenu à cette disposition, puisque si les documents publicitaires donnent des exemples chiffrés de gains, ils ne font aucune allusion à une baisse du CAC 40 de 23 % ou plus et ne donnent aucun exemple chiffré de perte de capital ; que même si les souscripteurs ont reconnu avoir reçu la notice d'information et en avoir pris connaissance, ce document est insuffisant, dès lors qu'il vient d'être vu que la publicité délivrée n'informait pas les clients des risques inhérents à l'investissement qui leur était proposé ;
ET AUX MOTIFS D'AUTRE PART A LES SUPPOSER ADOPTES, que les informations données par les conseillers financiers et notamment l'argument commercial mettaient en exergue le taux proposé ; que de plus les deux dépliants publicitaires présentant Bénéfic ne permettent pas de faire clairement le lien entre ce placement et les marchés d'actions ; que le CAC est défini comme un indice représentant les 40 plus grandes entreprises françaises et l'euro 50 comme les 50 plus grandes entreprises de la zone euro, sans que le souscripteur sache s'il s'agit d'actions ou d'obligations ; que la signification de ces indices n'est pas nécessairement aisée à comprendre pour tous les publics et notamment les demandeurs ; qu'un produit indexé sur des sociétés cotées en bourse est un produit spéculatif ; que les conseillers financiers n'ont pas vraiment insisté sur ce point et ont rassuré les demandeurs en s'appuyant sur le correcteur d'indice de 23 % intégré au produit Bénéfic ; que cette expression peu claire pouvait laisser penser aux demandeurs que les pertes éventuelles étaient automatiquement compensées d'autant que la publicité incisive des dépliants publicitaires, relayée par les conseillers financiers de La Poste, comportait des termes rassurants, laissant penser qu'il s'agissait d'un placement sans risque au regard des arguments employés ; que les dépliants expliquent, mais en caractères beaucoup plus petits, que les 23 % sont calculés sur la valeur liquidative du CAC ou de l'euro 50 à trois ans, ce qui «protège le capital net investi jusqu'à 23 % de baisse de l'euro 50», mais les exemples qui en sont donnés (baisse du CAC 40 ou de l'euro 50 de 5 à 10 % et jamais au-delà de 23 %) font encore apparaître un bénéfice substantiel ; que la mention Bénéfic 3 ans plus 23 % a pu être interprétée à partir des exemples donnés comme la garantie d'un rapport situé entre 13 % et 23 % à l'échéance du contrat ; que La Poste ne démontre pas avoir avisé les demandeurs des risques de perte possible en capital, ce produit fluctuant selon l'évolution des marchés financiers ; qu'en mettant à la disposition de ses clients des produits à caractère spéculatif, un rendement hasardeux, et comportant des risques sérieux sur la pérennité de leur épargne, La Poste s'obligeait de fait à une particulière rigueur et vigilance dans la mise en oeuvre de l'information en général et personnalisée destinée à sa clientèle ; que La Poste ne justifie pas que les demandeurs avaient une connaissance des mécanismes des marchés financiers ou des opérations de bourse ; que les brochures publicitaires versées aux débats indiquent en page intérieure : pour le placement Bénéfic basé sur le CAC : plus de performance plus 23 % en trois ans que le CAC fasse 0 % ou plus ; plus de clarté vous savez dès le départ où vous allez ; - pendant 12 trimestres votre épargne fructifie à la vitesse V ; une nouveauté majeure en matière de placement, Bénéfic vous fait profiter, même en cas de recul du CAC, d'un effet «correcteur à la hausse pour rester gagnant – concrètement si le CAC baisse Bénéfic en corrige les effets à la hausse en réalisant 23 % de mieux que l'évolution du CAC sur la même période. Une innovation qui permet de valoriser votre capital net investi jusqu'à moins 23 % de baisse du CAC ;
1/ ALORS QU'en examinant d'office la conformité des documents publicitaires au regard de l'article 33 du règlement de la COB n°89-2, qui constitue le fondement unique de la décision de condamnation de la Banque Postale et de La Poste, sans rouvrir les débats et soumettre ce moyen à la contradiction des parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2/ ALORS QUE en jugeant que l'article 33 du règlement 89-2 de la COB imposait que la publicité mentionne les caractéristiques les moins favorables et donc les pertes, ce qui imposait de donner des exemples chiffrés de perte de capital, la cour d'appel a ajouté à l'article 33 du règlement de la COB n° 89-2 une condition qu'il ne contenait pas, violant ainsi cette disposition ;
3/ ALORS QUE en retenant que les documents publicitaires ne faisaient aucune allusion à une baisse du CAC 40 de 23 % ou plus ni ne donnait aucun exemple chiffré de perte de capital et n'informait donc pas les clients des risques inhérents à l'investissement proposé, après avoir cependant constaté, par motifs adoptés, que «le document publicitaire mentionnait que «si le CAC baisse Bénéfic en corrige l'effet à la hausse, en réalisant 23 % de mieux que l'évolution du CAC sur la même période. Une innovation qui permet de valoriser votre capital net investi jusqu'à moins 23 % de baisse du CAC 40» et que les dépliants expliquaient «que les 23 % sont calculés sur la valeur liquidative du CAC ou de l'euro 50 à trois ans ce qui protège le capital net investi jusqu'à 23 % de baisse de l'euro 50», la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles 1147 du code civil et l'article 33 du règlement COB 89-2 ;
4/ ALORS QUE la Banque Postale faisait valoir que les documents publicitaires portaient mention du risque inhérent à tout placement de perte en capital en ce qu'ils précisaient notamment que la mention «restez gagnant même si le CAC baisse * !» avait le caractère d'un slogan qui s'inscrivait dans un dispositif général («Bénéfic l'épargne musclée», «Plus 23 % à trois ans* que le CAC fasse 0 % ou plus») et dont les restrictions ou les explications étaient apportées par l'astérisque qui renvoyait aux informations consommateurs dont la lisibilité était assurée par un contraste de couleur (lettres noires sur fond jaune) qui indiquaient notamment que le rendement était «conditionné par la stabilité ou l'évolution positive du CAC sur la période» ou que «la valeur liquidative (VL) le 28/10/2002 sera égale à la VL de référence majorée de 23 % et diminuée de la baisse éventuelle du CAC mesurée en pourcentage» ; qu'en se bornant, pour retenir le manquement de La Poste à son obligation d'information, à apprécier partiellement le libellé du document publicitaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil et 33 du règlement COB 89-2 ;
5/ ALORS QUE pour retenir le manquement de La Poste à son obligation d'informer son client sur les risques du placement considéré, la cour d'appel s'est exclusivement attachée à apprécier le libellé des documents publicitaires, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si la notice d'information faisait mention du risque lié à la baisse du CAC 40 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil et 33 du règlement COB 89-2 ;
6/ ALORS QUE, en jugeant que si La Poste soutient que certains intimés n'ont jamais eu en mains le dépliant querellé ou n'en ont jamais eu connaissance, elle ne le démontre pas, à l'exception de Mme K..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant ainsi l'article 1315 du code civil ;
7/ ALORS QUE après avoir constaté que La Poste établissait que Mme K... n'avait jamais eu en mains le dépliant litigieux ni n'en avait jamais eu connaissance, elle a cependant considéré que cette dernière n'avait pas été informée des risques inhérents à l'investissement, le courrier de La Poste adressé à Mme K..., qui reprenait très exactement le contenu des dépliants publicitaires, ne comportant pas les informations requises ; qu'en statuant ainsi alors que Mme K... n'invoquait nullement le caractère trompeur du courrier que La Poste lui avait adressé, la cour d'appel a relevé d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations, violant ainsi l'article 16 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement La Poste et la Banque Postale à payer à titre de dommages et intérêts à M. X..., Mme X..., M. Y..., Mme L..., M. Z..., Mme Z..., M. E..., Mme D..., M. C..., M. F..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., Mme K..., M. J... les sommes visées au dispositif de l'arrêt attaqué ;
AUX MOTIFS QUE les souscripteurs ont subi une perte de chance de ne pas avoir souscrit à ce placement, perte de chance qui ne peut pas indemniser la totalité du préjudice subi, contrairement à ce qu'a décidé le tribunal ; que la perte du capital de chaque intimé, tel que repris par les premiers juges, n'est pas contestée par La Poste ; que la cour estime donc disposer des éléments suffisants pour chiffrer le préjudice de chaque souscripteur comme indiqué au dispositif de la présente décision ;
ALORS QUE, après avoir jugé que le préjudice subi par chacun des souscripteurs ne pouvait être fixé à la totalité de la perte du capital de chaque intimé, tel que repris par les premiers juges, la cour d'appel a cependant indemnisé M. Y... à hauteur de 99,22 % des pertes subies, M. C... à hauteur de 99,15 %, M. et Mme F... à hauteur de 99,79 % chacun, Mme G... 99,77 %, M. I... 99,47 %, Mme K... 99,56 % ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article 1147 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné solidairement La Poste et la Banque Postale à payer à titre de dommages et intérêts à M. X..., Mme X..., M. Y..., Mme L..., M. Z..., Mme Z..., M. E..., Mme D..., M. C..., M. F..., Mme F..., Mme G..., M. H..., M. I..., Mme K..., M. J... les sommes visées au dispositif de l'arrêt attaqué ;
ALORS QUE l'article 16 II de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales dispose que «l'ensemble des biens, droits et obligations de toute nature liés aux services financiers, y compris les participations, de La Poste sont transférés à une filiale agréée en qualité d'établissement de crédit, soit la Banque Postale et que ces transferts sont réalisés de plein droit sans qu'il soit besoin d'aucune formalité nonobstant toute disposition ou stipulation contraire ; qu'ils entraînent l'effet d'une transmission universelle du patrimoine ainsi que le transfert de plein droit et sans formalité des accessoires des créances cédées des sûretés réelles et personnelles les garantissant» ; qu'en vertu de ce texte, de l'article 5 du décret n° 2005-1068 du 30 août 2005 pris pour l'application de l'article 16 de la loi précitée, La Poste avait donc transféré, à compter du 31 décembre 2005, à la Banque Postale l'ensemble des biens, droits et obligations de toute nature liés à ses services financiers, dans le cadre d'un apport en nature conformément aux dispositions de l'article 1843-3 du code civil ; que La Poste ne pouvait donc être légalement condamnée, l'ensemble des biens, droits et obligations de toute nature liés aux services financiers ayant été transférés à la Banque Postale ; qu'en condamnant solidairement La Poste et la Banque Postale, la cour d'appel a violé les articles 16 II de la loi n° 2005-516 du 20 mai 2005 et l'article 5 du décret n° 2005-1068 du 30 août 2005, ensemble l'article 1147 du code civil.
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour l'association Consommation, logement et cadre de vie, de M. et Mme X..., de M. Y..., de M. et Mme Z..., de Mme B..., de M. C..., de Mme D..., de M. E..., de M. et Mme F..., de Mme G..., de M. H..., de M. I..., de M. J..., de Mme K... et de Mme L..., demandeurs au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR réformé le jugement sur le montant des pertes subies par les souscripteurs et d'AVOIR limité la condamnation solidaire de LA POSTE et de la BANQUE POSTALE au profit des souscripteurs aux sommes de 410 euros pour Monsieur X..., 410 euros pour Madame X..., 1.400 euros pour Monsieur Y..., 3.000 euros pour Madame L..., 1.000 euros pour Monsieur Z..., 1.500 euros pour Madame Z..., 2.500 euros pour Monsieur E..., 1.500 euros pour Madame D..., 5.700 euros pour Monsieur C..., 1000 euros pour Madame B..., 2.600 euros pour Monsieur F..., 2.600 euros pour Madame F..., 5.300 euros pour Madame G..., 4.500 euros pour Monsieur H..., 11.200 euros pour Monsieur I..., 2.500 euros pour Madame K..., 5.800 euros pour Monsieur J... ;
AUX MOTIFS QUE aucun des souscripteurs n'a été informé par LA POSTE des risques inhérents à l'investissement et de toutes les conséquences liées à l'évolution défavorable du CAC 40 ; que les souscripteurs ont donc subi une perte de chance de ne pas avoir souscrit à ce placement, perte de chance qui ne peut indemniser la totalité du préjudice subi, contrairement à ce qu'a décidé le Tribunal ; que la perte du capital de chaque intimé, tel que repris pas les premiers juges, n'est pas contesté par LA POSTE ; que la Cour estime donc disposer des éléments suffisants pour chiffrer le préjudice de chaque souscripteur comme indiqué au dispositif de la présente décision ;
1°-ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est fixé par les prétentions respectives des parties ; que dans leurs conclusions, LA POSTE et La BANQUE POSTALE ne contestaient ni le principe, ni la nature, ni l'étendue du préjudice subi par les souscripteurs du produit BENEFIC, se bornant à contester leur faute ; qu'en limitant néanmoins l'indemnisation du préjudice des souscripteurs à la réparation d'une perte de chance de ne pas avoir souscrit au placement BENEFIC, la Cour d'appel a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°-ALORS QUE le juge ne peut soulever d'office un moyen sans inviter les parties à en discuter contradictoirement ; que dans leurs conclusions, aucune des parties n'avait fait valoir que le préjudice des souscripteurs du produit BENEFIC s'analysait en une perte de chance ; qu'en décidant néanmoins que les souscripteurs n'avaient subi qu'une perte de chance de ne pas avoir souscrit ce placement, sans inviter les parties à discuter de ce moyen contradictoirement, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile.
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