vendredi, 20 août 2010
Un exemple de publicité mensongère
"Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Pierre,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 15 avril 2009, qui, pour publicité mensongère, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1 et 121-5 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause, 1351 du code civil, 5, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a reçu Julien et Eric Y... en leur constitution de partie civile et a condamné Jean-Pierre X... à leur verser la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts et en ce qu'il a reçu Raymond Z... en sa constitution de partie civile et a condamné Jean-Pierre X... à lui verser les sommes de 3 200 euros en réparation du préjudice locatif, 4 000 euros en réparation des frais locatifs et 360 euros en réparation des frais d'assurance ;
"aux motifs que pour être applicable, l'article 5 du code de procédure pénale suppose une identité de partie, d'objet et de cause ; qu'Eric Y... et Julien Y... ont assigné devant le tribunal de grande instance de Grasse la société MHI afin de voir prononcer la résolution du contrat ; que le tribunal a prononcé la résolution du contrat « pack spécial investisseur » et condamné la société à leur payer la somme de 37 584,80 euros, somme dont ils n'ont pu obtenir le paiement du fait de la clôture de la procédure de liquidation ; que, toutefois, dans le cas présent, c'est Jean-Pierre X... qui est poursuivi pour des faits de publicité mensongère ; que, dès lors, l'action des parties civiles ne concerne pas la même partie et n'a pas la même cause ; que l'article 5 du code de procédure pénale ne peut donc être opposé à la partie civile ; que l'action de Raymond Z... devant le juge de proximité du tribunal d'instance de Moissac a visé la société MHI ; qu'il n'y a donc pas identité de partie, la procédure pénale visant Jean-Pierre X... ; que l'article 5 du code de procédure pénale ne peut donc être opposé à la partie civile » ;
"alors que la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut plus la porter devant la juridiction répressive ; qu'il y a identité de partie lorsqu'une partie agit successivement en réparation du dommage né de la même infraction contre la société responsable et son dirigeant ; qu'en accueillant les constitutions de partie civile d'Eric et Julien Y... et Raymond Z..., qui avaient d'ores et déjà agi devant les juridictions civiles au motif qu'il n'y avait pas identité de partie quand Jean-Pierre X... était poursuivi parce qu'en sa qualité de dirigeant de la société Mobil Home Investissement il avait effectué une publicité comportant des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur, la cour d'appel a violé les textes susvisés";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société Mobil Home Investissements (MHI), dont Jean-Pierre X... était le gérant, a diffusé une publicité garantissant un revenu locatif annuel de 2 500 euros minimum à toute personne qui achèterait, par son intermédiaire, un mobile home dont elle lui confierait la gestion ; que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a été saisie, entre décembre 2004 et juin 2005, de plusieurs plaintes de clients de la société MHI reprochant à cette dernière de ne pas avoir respecté ses engagements ; qu'au terme de l'enquête, Jean-Pierre X... a été convoqué par procès-verbal du 14 septembre 2006 sous la prévention de publicité de nature à induire en erreur devant le tribunal correctionnel ; que plusieurs clients se sont constitués parties civiles, dont Eric et Julien Y..., ainsi que Raymond Z... ; que le tribunal a déclaré le prévenu coupable et a prononcé sur les intérêts civils, par jugement dont il a été relevé appel ;
Attendu que, pour écarter l'exception d'irrecevabilité des constitutions de parties civiles d'Eric et de Julien Y... ainsi que de Raymond Z..., prise de la violation de l'article 5 du code de procédure pénale, l'arrêt relève que seule la société MHI a été assignée devant le juge civil et que la demande des consorts Y... avait pour objet la résolution du contrat conclu avec cette dernière ; que les juges ajoutent que cette société a été dissoute puis liquidée, et que Jean-Pierre X... a été poursuivi personnellement devant la juridiction répressive ; qu'ils en déduisent que l'article précité, qui interdit à une partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente de la porter devant la juridiction répressive, sous réserve de l'identité de partie, d'objet et de cause, n'est pas applicable en l'espèce ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 du code de la consommation, 2 et 3 du code de procédure pénale et 591 et 593 du même code ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable les constitutions des parties civiles et condamné Jean-Pierre X... à leur verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts en réparation des revenus locatifs non perçus, des frais de location et d'assurance ;
"aux motifs que la cour trouve dans les pièces de la procédure et les débats les éléments nécessaires et suffisants pour fixer ainsi les montants des dommages-intérêts que le prévenu devra verser aux parties civiles ci-dessous mentionnées ayant subi un préjudice certain découlant directement de l'infraction de publicité mensongère de nature à induire en erreur ; qu'en effet, c'est le caractère trompeur de la publicité incriminée qui a déterminé les plaignants à signer les contrats avec la société MHI dont ils n'ont pu obtenir les avantages promis ;
"alors que seuls les préjudices personnels, certains et directement causés par l'infraction, ouvrent droit à réparation ; que Jean-Pierre X... soulignait que les demandes des parties civiles au titre de la perte des revenus locatifs ne pourraient être accueillies, cette perte ne résultant pas directement de l'infraction mais étant la conséquence de la seule carence des sociétés de camping ; qu'en se bornant à relever que c'est le caractère trompeur de la publicité qui avait conduit les parties civiles à contracter avec la société Mobil Home Investissements pour accueillir les demandes des parties civiles au titre de la perte des revenus locatifs, motifs qui ne caractérisent pas le lien direct entre la publicité mensongère ou de nature à induire en erreur et cette perte de revenus, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés";
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 du code de la consommation, 2 et 3 du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Jean-Pierre X..., déclaré coupable de publicité mensongère de nature à induire en erreur, à rembourser à certaines parties civiles (François A..., Gérard B..., Jean-Paul C..., Philippe D..., Philippe et Laurent E..., Claude F... et Henri G..., Caroline H...) le prix du mobil home acquis en application de la plaquette publicitaire reçue « satisfait ou remboursé » et à leur payer en outre les revenus attendus de cet investissement ;
"alors que si les juges du fond apprécient souverainement le montant des réparations allouées à la victime d'une infraction, il ne saurait en résulter pour celle-ci ni perte ni profit ; qu'en allouant aux parties civiles qui en avaient fait la demande le remboursement intégral de leur investissement (le prix d'achat du mobil home), outre les revenus attendus, (les loyers impayés et les loyers à venir), sans tenir aucunement compte du fait que ces parties restaient propriétaires du mobil home et que certaines d'entre elles l'avaient occupé à titre personnel ou l'avait donné en location, ou encore l'avait revendu ), la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus ;
"alors que si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice qui résulte d'une infraction, il en est autrement lorsque cette appréciation est déduite de motifs contradictoires, erronés ou ne répondant pas aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, Jean-Pierre X... faisait valoir que les demandes des parties civiles incluaient le montant de la taxe sur valeur ajoutée, alors qu'elles avaient obtenu le remboursement de cette taxe sur valeur ajoutée dans le cadre de leur investissement locatif" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du préjudice résultant pour les parties civiles de l'infraction commise par Jean-Pierre X..., la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que Jean-Pierre X... devra payer à Philippe E..., Laurent E..., Claude F..., Alain I..., Henri G..., Jean J..., Roger K..., Hélène K... et Philippe D..., à 1 000 euros celle qu'il devra payer à Claude L..., à 1 000 euros celle qu'il devra payer à Madeleine M..., à 2 000 euros celle qu'il devra payer à Vincent N..., à 2 000 euros celle globale qu'il devra payer à Gérard B... et à François A..., au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale."
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